Je pensais comme celà être fort. Je pensais pouvoir accompagner ma mère avec détermination et optimisme. Lui montrer la vie, cette nouvelle maison accueillante, l'espoir.
Avant de partir, dimanche matin, je me suis enfermé dans l'atelier de mon père. Encore pris par les mâchoires de l'étau, un nouvel outil destiné sans doute à tracer des sillons dans la terre attendait d'être soudé. Partout des vis, des clous, des interrupteurs, des poignées de meubles, des bouts de câbles, de ficelles enroulées, des pots remplis de matières ou translucides et colorées ou épaisses et grasses, des outils abandonnés sur le plan de travail: la vie arrêtée comme si mon père s'en était allé juste déjeuner ou jouer aux boules.
Je me suis effondré. J'ai décroché d'un clou une plaque d'aluminium qu'on trouvait autrefois rivetée devant les fenêtres des wagons "ne pas se pencher au dehors, nicht hinauslehnen". D'anciens wagons destinés à la réforme, il avait tout récupéré jusqu'aux vitres derrière lesquelles mûrissaient encore dimanche ses tomates.
Papa. Papa dont le visage s'illumine quand il aperçoit sa femme "Maman!"